RUITER CONSTRUCTION LTD.

Décisions


RUITER CONSTRUCTION LTD.
Dossier no : PR-98-045

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le vendredi 30 avril 1999

Dossier no : PR-98-045

EU ÉGARD À une plainte déposée par la société Ruiter Construction Ltd. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.), modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Raynald Guay
_________________________
Raynald Guay
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire






Date de la décision : Le 30 avril 1999

Membre du Tribunal : Raynald Guay

Gestionnaire de l’enquête : Randolph W. Heggart

Avocats pour le Tribunal : Gerry Stobo
Tamra Alexander

Plaignante : Ruiter Construction Ltd.

Institution fédérale : Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

Le 8 février 1999, la société Ruiter Construction Ltd. (Ruiter) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] (la Loi sur le TCCE), à l’égard du marché public (numéro d’invitation TPD W1PW1-8-J004/000/A) du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère) pour la fourniture de services de construction portant sur la rénovation et l’aménagement des bureaux du Centre de la sécurité des télécommunications (CST), sis au 1500, avenue Bronson, Ottawa (Ontario).

Ruiter a allégué que, contrairement aux dispositions de l’Accord sur le commerce intérieur [2] (l’ACI), le Ministère n’a pas : 1) clairement indiqué, dans les documents d’appel d’offres, que la lettre d’attestation de conformité à l’an 2000 était exigée; 2) précisé que la lettre ferait partie de l’évaluation des offres; 3) précisé la méthode de pondération et d’évaluation de la lettre; 4) précisé que, en l’absence de cette lettre, l’offre serait rejetée. Ruiter a aussi allégué que le Ministère n’a pas donné un délai suffisant aux soumissionnaires pour diffuser l’information nécessaire pour se conformer aux conditions énoncées dans les documents d’appel d’offres.

Après avoir fait observer que le marché lié à l’appel d’offres en cause avait été adjugé à un autre entrepreneur, soit la société M.P. Lundy Construction (Ontario) Ltd. (M.P. Lundy), et qu’il était donc trop tard pour que le marché lui soit attribué, Ruiter a demandé, à titre de mesure corrective, que le Ministère lui accorde un contrat de services de construction pour un projet d’une envergure similaire à celle du projet du 1500, avenue Bronson ou encore des demandes de services d’une valeur comparable portant sur des services de conception-construction, de gestion de travaux de construction et de gestion de projets. Comme solution de rechange, Ruiter a demandé à recevoir une indemnité en reconnaissance des profits qu’elle aurait tirés du projet du 1500, avenue Bronson.

Le 11 février 1999, le Tribunal a avisé les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur une partie de la plainte, puisque cette dernière remplissait les conditions d’enquête énoncées à l’article 7 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [3] (le Règlement). Le motif de plainte de Ruiter, concernant l’allégation d’un délai de soumission insuffisant, n’a pas été accueilli aux fins de l’enquête puisque, de l’avis du Tribunal, la plainte n’a pas été déposée dans les délais prescrits à l’article 6 du Règlement. Ruiter a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir ce motif à l’origine de sa plainte au moment de la réception des documents d’appel d’offres, au cours du mois de septembre 1998.

Au moment où la plainte a été communiquée au Ministère, le Tribunal a demandé à ce dernier de lui soumettre ses observations sur la question de savoir si le CST était une entité fédérale visée dans l’ACI. Le 18 février 1999, dans une lettre au Tribunal, le Ministère a indiqué que, à son avis, « puisque le CST fait partie du ministère de la Défense nationale [MDN] et que les marchés publics du MDN sont visés dans l’ACI, le CST doit aussi être soumis à l’ACI » [traduction]. Le 9 mars 1999, le Ministère a déposé auprès du Tribunal un rapport de l’institution fédérale (RIF) en application de l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [4] . Le 22 mars 1999, Ruiter a déposé ses observations sur le RIF auprès du Tribunal.

Les renseignements au dossier permettant de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte à partir des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Le 29 septembre 1998, le Ministère a publié un avis de projet de marché relatif au besoin, précisé en détail dans l’appel d’offres publié par l’entremise du Service électronique d’appels d’offres canadien (MERX).

Les documents d’appel d’offres publiés par l’entremise du MERX comprenaient des directives pour une visite de chantier obligatoire, des directives spéciales aux soumissionnaires (les directives spéciales), la formule de soumission, la liste des sous-traitants et les plans et devis « A » (les devis).

Les directives spéciales comprennent à la section 1, « Documentation relative aux soumissions », une liste de documents faisant partie de la documentation relative aux soumissions et au marché, qui comprend, notamment, le document « Directives générales aux soumissionnaires » (les directives générales). Les documents énumérés comme documents relatifs aux soumissions au paragraphe 1.1 des directives générales comprennent les devis, à l’alinéa 1.1.3, et les directives générales, à l’alinéa 1.1.4. Le paragraphe 1.1 des directives spéciales prévoit, notamment, ce qui suit :

La présentation d’une soumission constitue une reconnaissance du fait que le soumissionnaire a lu ces documents et les autres documents énumérés au paragraphe 1.1 des directives générales aux soumissionnaires et convient qu’il est lié par leur contenu.

[Traduction]

La même disposition se retrouve au paragraphe 1.2 des directives générales.

Le paragraphe 2.1 des Directives générales prévoit ce qui suit :

L’offre doit être :

.1 présentée sur la formule de soumission fournie par l’entremise du SIOS [MERX]; les substituts et les soumissions transmises par télécopie ne seront pas acceptés;

.2 fondée sur la documentation relative aux soumissions énumérée ci-dessus;

.3 correctement établie à tous égards;

.4 signée en conformité avec la procédure de signature énoncée dans les présentes;

.5 accompagnée d’une garantie de soumission comme il est indiqué dans les présentes.

[Traduction]

Le paragraphe 13.1, « Acceptation des offres », des directives générales prévoit ce qui suit :

Sa Majesté peut accepter toute offre, qu’il s’agisse de l’offre au plus bas prix ou non, ou peut rejeter la totalité ou une partie des offres.

[Traduction]

Les devis comprennent une table des matières, suivie immédiatement de la section 01016, « Directives générales ». Le paragraphe 21 de la section 01016 est intitulé « L’an 2000 » et énonce les conditions relatives à l’an 2000 imposées à l’entrepreneur général, notamment, ainsi qu’il suit :

L’an 2000

.1 Tous les produits inclus dans le projet en question doivent être fournis selon l’entente claire qu’ils ne seront pas affectés par les problèmes des systèmes informatiques liés à l’an 2000.

.2 En outre, si les produits font appel à un quelconque dispositif à logique informatique, l’entrepreneur général doit joindre une lettre à sa soumission, dans laquelle il atteste que tout l’équipement et le matériel seront conformes à l’an 2000.

[Traduction]

Le paragraphe 28 de la section 15010 des devis, « Exigences mécaniques générales », et le paragraphe 22 de la section 16010 des devis, « Électricité - Exigences générales », comprennent les mêmes conditions.

L’addenda no 5 aux devis, daté du 14 octobre 1998, a modifié chacune des conditions portant sur la conformité à l’an 2000, indiquées dans les sections 01016, 15010 et 16010 des devis, par l’insertion d’une condition appelée « Note de vérification ». L’addenda n’a pas supprimé la condition selon laquelle l’entrepreneur général était tenu de soumettre une lettre d’attestation de conformité à l’an 2000.

Les devis font mention de l’équipement qui renferme des dispositifs à logique informatique, comme suit : section 16261, systèmes UPS (alimentation sans coupure); section 16721, systèmes d’alarme-incendie; section 16431, appareillage de connexion secondaire.

La date de clôture de l’appel d’offres a été fixée au 30 octobre 1998. Douze sociétés ont déposé une soumission à l’Unité de réception des soumissions (l’URS), y compris Ruiter et M.P. Lundy. Le même jour, l’URS, en conformité avec la procédure d’ouverture publique des soumissions, a lu les 12 prix soumis. L’URS n’a pas examiné les offres en termes de leur conformité et n’a procédé à aucune forme d’évaluation des soumissions. Le même jour également, l’URS a indiqué aux soumissionnaires présents à l’ouverture publique des soumissions, dont Ruiter, que le prix d’un soumissionnaire particulier, annoncé à l’ouverture publique des soumissions, était inexact et, de ce fait, que la soumission de Ruiter était la moins-disante.

Le 2 novembre 1998, le Ministère a envoyé une télécopie à Ruiter afin d’établir une rencontre pour discuter de l’habilitation de sécurité. La télécopie indique, notamment, ce qui suit : « L’objet de la réunion est de discuter de la question indiquée en rubrique [Réunion pour habilitation de sécurité] avec l’agent [de sécurité] du CST ainsi qu’il suit (avant l’adjudication du marché) » [traduction].

Le 4 novembre 1998, la réunion susmentionnée a eu lieu, mettant en présence le gestionnaire de projet du Ministère, Ruiter, les sous-traitants et l’agent de sécurité du CST pour discuter des exigences de sécurité liées au projet. Selon le RIF, la réunion a été organisée parce que le gestionnaire de projet savait que la soumission de Ruiter était la soumission la moins-disante et que l’environnement hautement sécuritaire du projet exigerait un long processus de vérification aux fins de l’habilitation de sécurité. Selon le Ministère, même si le gestionnaire du projet a cru, par anticipation, que l’évaluation de la soumission de Ruiter indiquerait que cette dernière répondait à toutes les conditions de soumissions, en aucun temps Ruiter n’a-t-elle été informée qu’un marché lui avait été adjugé.

Le personnel affecté à la négociation des contrats du Ministère a subséquemment déterminé que la soumission de Ruiter ne contenait pas la lettre de conformité à l’an 2000 exigée. La soumission au deuxième plus bas prix, celle de M.P. Lundy, contenait une telle lettre. Le 24 novembre 1998, le Ministère a octroyé le marché, d’une valeur de 6 385 919 $, TPS incluse, à M.P. Lundy. Le 25 novembre 1998, le Ministère a fait parvenir à Ruiter une lettre qui précisait, notamment, ce qui suit : « Nous voudrions vous aviser que le Ministère n’a pas pu prendre en considération votre soumission à l’égard du projet susmentionné parce que votre société n’a pas soumis de lettre attestant que l’équipement et le matériel renfermant un quelconque dispositif à logique informatique seraient conforme à l’an 2000 (clause 21.2, section 01016, Directives générales) » [traduction].

Selon le RIF, quatre des soumissionnaires au projet en question ont soumis la lettre de conformité à l’an 2000 exigée en même temps que leur soumission.

BIEN-FONDÉ DE LA PLAINTE

Position du Ministère

Le Ministère a fait observer que l’invitation à soumissionner qui fait l’objet de la présente enquête est un appel d’offres relatif à un marché de travaux de construction. De tels appels d’offres, selon le Ministère, ne comportent pas d’évaluation à cotation numérique ni de critères de sélection. Le marché est, d’une façon générale, adjugé à la soumission la moins-disante qui se conforme aux conditions énoncées dans la documentation relative aux soumissions.

En ce qui a trait à l’affirmation de Ruiter que, ayant présenté la soumission la moins-disante, cette dernière aurait dû être acceptée malgré l’absence de la lettre de conformité à l’an 2000 dans sa soumission, le Ministère a soutenu que Ruiter n’a pas répondu à toutes les conditions énoncées dans la documentation relative aux soumissions.

Le Ministère a qualifié de dénuée de fondement l’affirmation de Ruiter, selon laquelle le Ministère n’a pas correctement indiqué que la lettre de conformité à l’an 2000 devait être soumise. Le Ministère a fait valoir que la nécessité de soumettre une lettre de conformité à l’an 2000 est explicitement énoncée à trois reprises, dans des sections différentes, dans la documentation relative aux soumissions, sous la rubrique « L’an 2000 », qui est en caractères gras.

En ce qui a trait à la suggestion de Ruiter, selon laquelle les directives générales auraient dû être révisées pour inclure une condition portant sur la lettre de conformité à l’an 2000, le Ministère a soutenu qu’une telle modification n’était ni requise ni pertinente. Le Ministère a soutenu que les directives générales énuméraient clairement tous les documents qui s’appliquaient et exigeaient clairement que les offres soient fondées sur la documentation relative aux soumissions et « correctement remplis à tous égards ».

À propos de l’affirmation de Ruiter selon laquelle le Ministère aurait dû inclure la demande de lettre de conformité à l’an 2000 dans les directives spéciales, le Ministère a soutenu que les directives spéciales énonçaient les documents qui faisaient partie de la documentation relative aux soumissions et au marché. Le Ministère a aussi fait observer que le soumissionnaire devait reconnaître qu’il avait lu tous lesdits documents et qu’il convenait d’être lié par leur contenu.

En outre, sur la question de l’allégation de Ruiter selon laquelle la lettre de conformité à l’an 2000 n’était pas exigée aux termes de la « Liste de vérification de l’invitation à soumissionner » comprise dans le Manuel d’approvisionnement du Ministère, le Ministère a soutenu que, bien que la clause 6.332 du Manuel d’approvisionnement contienne des clauses portant sur la garantie de conformité à l’an 2000, dans les circonstances particulières au marché public en question, il était nécessaire d’inclure une condition supplémentaire portant sur une lettre de conformité à l’an 2000 de la part de l’entrepreneur général. De telles obligations distinctes portant sur la conformité à l’an 2000 ont été, selon le Ministère, considérées au moment de la préparation de l’appel d’offres.

Sur la question de l’addenda no 5 à la documentation relative aux soumissions, le Ministère a soutenu que la condition portant sur la conformité à l’an 2000 n’a jamais été supprimée. En fait, le Ministère a soutenu que l’addenda no 5 a ajouté à la condition, en insérant une condition portant sur le dossier de vérification dans chacune de trois sections des devis.

Enfin, le Ministère s’est dit d’avis que la non-soumission de la lettre de conformité à l’an 2000 est significative. L’entrepreneur général, selon le Ministère, est l’entité avec laquelle la Couronne établit un lien de droit contractuel. L’entrepreneur général est responsable de l’exécution réussie du marché et c’est pour cette raison qu’une lettre d’attestation a été exigée de l’entrepreneur général.

Position de Ruiter

En ce qui a trait aux politiques et procédures du Ministère portant sur les invitations à soumissionner, Ruiter a soutenu que, au fil des ans, les entrepreneurs en sont venus à bien connaître les procédures et les directives du Ministère, y compris les directives écrites sur la manière de présenter les offres, la façon dont les révisions des conditions de présentation des soumissions sont précisées et l’endroit où trouver les directives spéciales. Dans un tel contexte, Ruiter a soutenu que les conditions portant sur l’inclusion de tout renseignement ou de tout document (c.-à-d. la lettre de conformité à l’an 2000) non énoncées dans les directives générales devraient être énoncées dans les directives spéciales. En l’espèce, Ruiter a soutenu que le Ministère a omis de refléter la condition portant sur la lettre de conformité à l’an 2000 dans les directives spéciales. Selon Ruiter, ce changement dans la pratique du Ministère a fait qu’elle-même et sept des douze soumissionnaires qui ont présenté des offres dans le cadre de l’invitation à soumissionner en question ont cru que la lettre n’était pas exigée. À tout le moins, Ruiter a soutenu que la condition n’a certainement pas été clairement indiquée aux soumissionnaires.

En outre, Ruiter a soutenu que son analyse des documents relatifs à l’appel d’offres, quant aux exigences portant sur 1) une visite de chantier, 2) le recours à un bureau dépositaire des soumissions, 3) la garantie de soumission, 4) la liste de l’équipement et du matériel que les entrepreneurs en mécanique devaient soumettre et 5) la lettre de conformité à l’an 2000 — et les réponses s’y rapportant des soumissionnaires — indique que les conditions énoncées dans les directives spéciales et dans les directives générales ont été interprétées par tous les soumissionnaires comme étant des conditions obligatoires, tandis que les deux conditions qui n’ont pas été énoncées dans les directives spéciales et dans les directives générales n’ont pas suscité la même interprétation de leur part. Ruiter a soutenu que le Ministère aurait dû clairement énoncer dans ses documents d’appel d’offres les conditions qui pouvaient entraîner le rejet d’une proposition.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal est tenu, lorsqu’il a décidé d’enquêter, de limiter son étude à l’objet de la plainte. En outre, à la fin de l’enquête, le Tribunal doit déterminer le bien-fondé de la plainte en fonction du respect des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l’article 11 du Règlement prévoit, notamment, que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux exigences de l’ACI.

Le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit, notamment, que « [l]es documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères ». Le Tribunal doit donc décider si les documents d’invitation à soumissionner ont indiqué clairement que l’entrepreneur général devait soumettre une lettre de conformité à l’an 2000 avec sa soumission et si le Ministère a agi conformément aux dispositions du paragraphe 506(6) de l’ACI lorsqu’il a rejeté la soumission de Ruiter parce que cette dernière n’avait pas soumis la lettre requise.

Le Tribunal conclut que la condition portant sur la présentation d’une lettre de conformité à l’an 2000 avec la soumission n’a pas été supprimée par les modifications apportées à l’invitation à soumissionner. De fait, le Tribunal est d’avis que la condition susmentionnée a été renforcée par l’addenda no 5 à l’invitation à soumissionner. Le Tribunal fait également observer que Ruiter n’a pas soumis la lettre de conformité à l’an 2000 avec sa soumission. Ce fait n’est pas contesté.

Le Tribunal conclut que les devis indiquent clairement à trois endroits distincts (paragraphe 21 de la section 01016, paragraphe 28 de la section 15010 et paragraphe 22 de la section 16010), sous la rubrique « L’an 2000 », qui est en caractères gras, que, si les produits offerts par un soumissionnaire renferment un quelconque dispositif à logique informatique, « l’entrepreneur général doit joindre une lettre à sa soumission, dans laquelle il atteste que tout l’équipement et le matériel seront conformes à l’an 2000 ». En outre, le Tribunal conclut que les devis sont indiqués comme documents compris dans les documents relatifs à l’appel d’offres. D’une façon similaire, la section 1 des directives spéciales indique clairement que le document intitulé directives générales fait aussi partie des documents d’appel d’offres. Le Tribunal conclut que les directives générales indiquent clairement, au paragraphe 1.2, que la présentation d’une soumission constitue une reconnaissance du fait que le soumissionnaire ou proposant a lu les divers documents, y compris les devis, et convient qu’il est lié par leur contenu. De plus, le Tribunal est d’avis que l’alinéa 2.1.3 des directives générales indique clairement que, pour être déclarée conforme, une offre ou une soumission doit être « correctement établie à tous égards ».

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal détermine que les documents d’appel d’offres indiquent clairement que les soumissionnaires devaient soumettre la lettre d’attestation de conformité à l’an 2000 avec leur soumission. De plus, le Tribunal détermine que le Ministère a correctement rejeté la soumission de Ruiter, puisque cette dernière n’incluait pas la lettre de conformité à l’an 2000 exigée et ne satisfaisait donc pas à la condition énoncée à l’alinéa 2.1.3 des directives générales selon laquelle une offre devait être « correctement établie à tous égard ». Le Tribunal conclut donc que le Ministère a agi conformément aux dispositions applicables de l’ACI lorsqu’il a rejeté la soumission de Ruiter et que, par conséquent, la plainte n’est pas fondée.

Ruiter a soutenu que la façon dont le Ministère a procédé au fil des ans peut avoir suscité, au sein de la collectivité des soumissionnaires, des attentes quant à l’endroit où trouver certaines conditions du marché, influençant de ce fait la façon dont les soumissionnaires lisent les documents d’appel d’offres et l’importance qu’ils attachent à certaines sections par rapport à d’autres. Le Tribunal est conscient qu’il y a certainement avantage à structurer les documents d’appel d’offres d’une manière prévisible dans le but d’aider les soumissionnaires à les comprendre, et ainsi de permettre la soumission du plus grand nombre possible d’offres concurrentes. De même, le Tribunal est d’avis que le Ministère peut uniquement bénéficier de la mise en évidence, dans ses documents d’appel d’offres, des conditions essentielles qui pourraient être nouvelles ou particulières à un projet donné.

Néanmoins, le Tribunal est d’avis que les soumissionnaires doivent lire tous les documents relatifs à un appel d’offres et se conformer à chacune des conditions énoncées. En l’absence de directives claires et précises du Ministère, les soumissionnaires ne devraient jamais laisser de côté des dispositions des documents d’appel d’offres ni lire ces documents d’une façon sélective. Des dispositions comme celles qui se trouvent au paragraphe 1.2 et à l’alinéa 2.1.3 des Directives générales peuvent être lourdes de conséquences pour les soumissionnaires et pour la recevabilité des soumissions.

Dans le RIF, le Ministère a demandé d’avoir l’occasion de présenter d’autres observations sur les frais dans la présente affaire. Le Tribunal a décidé que les circonstances de la présente affaire ne justifient pas d’accorder les frais contre Ruiter. Bien que la plainte de Ruiter ne soit pas fondée, elle n’était pas dénuée de valeur [. Tribunal canadien du commerce extérieur, Flolite Industries, dossier no PR-97-045, Addenda, le 7 août 1998.] . Des exposés sur cette question ne sont donc pas nécessaires, et le Tribunal n’accordera pas le remboursement de frais.

DÉCISION DU TRIBUNAL

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal détermine, relativement à l’objet de la plainte, que le marché public a été passé conformément à l’ACI et que, par conséquent, la plainte n’est pas fondée.


1. L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

2. Signé à Ottawa (Ontario) le 8 juillet 1994.

3. DORS/93-602, le 15 décembre 1993, Gazette du Canada Partie II, vol. 127, no 26 à la p. 4547, modifié.

4. DORS/91-499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, no 18 à la p. 2912, modifiées.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 11 mai 1999