NORTHERN MICRO INC.

Décisions


NORTHERN MICRO INC.
Dossier no : PR-99-002

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le lundi 12 juillet 1999

Dossier no : PR-99-002

EU ÉGARD À une plainte déposée par Northern Micro Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.), modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Richard Lafontaine
_________________________
Richard Lafontaine
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire






Date de la décision : Le 12 juillet 1999

Membre du Tribunal : Richard Lafontaine

Gestionnaire de l’enquête : Randolph W. Heggart

Agent d’enquête : Dominique Laporte

Avocat pour le Tribunal : Gilles B. Legault

Partie plaignante : Northern Micro Inc.

Avocat pour la partie plaignante : E. Lindsay Gorrell

Institution fédérale : Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

Le 12 avril 1999, la société Northern Micro Inc. (Northern Micro) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] (la Loi sur le TCCE), à l’égard du marché public (numéro d’invitation 595EJ.46577-8-1628/A) du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère), en application de l’offre à commandes principale et nationale [2] (OCPN) no E60EJ-7-0004/0XX/EJ, pour la fourniture, la livraison et la configuration de 900 micro-ordinateurs [3] de bureau de type Advanced Pentium II, appartenant à la catégorie 2.1 de l’OCPN, avec option d’acheter jusqu’à 450 systèmes additionnels, pour le ministère du Revenu national (Revenu Canada).

Northern Micro a allégué que le Ministère a contrevenu aux dispositions de l’Accord de libre-échange nord-américain [4] (l’ALÉNA) et de l’Accord sur le commerce intérieur [5] (l’ACI) en déclarant, après l’adjudication du contrat à Northern Micro, que l’offre de cette dernière n’était pas conforme parce qu’elle ne répondait pas à un élément obligatoire des spécifications techniques et en annulant, pour ce motif, sa commande d’achat à Northern Micro.

Northern Micro a demandé, à titre de réparation, que le contrat lui soit adjugé. Par ailleurs, si le Ministère publie une nouvelle demande de ristourne [6] (DR), Northern Micro a demandé qu’aucun contrat ne soit adjugé en vertu de la nouvelle DR avant que le Tribunal ne détermine le bien-fondé de la plainte. Northern Micro a également demandé le remboursement des frais qu’elle a engagés pour la préparation de sa soumission ainsi que pour la préparation, le dépôt et le traitement de sa plainte.

Le 15 avril 1999, le Tribunal a informé les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur la plainte, puisque cette dernière répondait aux conditions d’enquête énoncées à l’article 7 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [7] (le Règlement). Le même jour, le Tribunal a rendu une ordonnance reportant l’adjudication de tout marché lié à cette procédure jusqu’à ce qu’il ait déterminé le bien-fondé de la plainte. Le 26 avril 1999, le Ministère a certifié par écrit au Tribunal que l’acquisition était urgente et qu’un retard pourrait être contraire à l’intérêt public. Par conséquent, le 3 mai 1999, le Tribunal a annulé l’ordonnance de report d’adjudication qu’il avait rendue le 26 avril 1999. Le 18 mai 1999, le Ministère a déposé auprès du Tribunal un rapport de l’institution fédérale (le RIF) en application de l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [8] . Le 28 mai 1999, Northern Micro a déposé ses observations sur le RIF auprès du Tribunal.

Les renseignements au dossier permettant de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Le 23 février 1999, le Ministère a reçu de Revenu Canada une demande visant les micro-ordinateurs susmentionnés. Ainsi, le 5 mars 1999, le Ministère a envoyé une DR aux huit proposants ayant, à cette date, des systèmes entrant dans la catégorie 2.1 de l’OCPN. La DR a pris fin le 12 mars 1999.

La DR, sous le paragraphe 1 de la rubrique « Proposition du soumissionnaire » indique, en partie, que : « Une offre doit être faite à l’égard de tous les éléments énumérés à l’annexe A pour que la proposition soit étudiée » [traduction]. La liste des produits livrables de l’annexe A comprend, à côté de l’élément 04, « Moniteur optionnel de 17 po, conformément à l’annexe C ». L’annexe C, intitulée « Description du moniteur » comporte, en partie, les exigences suivantes :

Tous les moniteurs demandés doivent respecter ou dépasser les exigences obligatoires suivantes :

Pour les moniteurs de 17 po :

• être équipés de haut-parleurs intégrés.

[Traduction]

La DR, sous le paragraphe 7 de la rubrique intitulée « Évaluation », prévoit ce qui suit :

Les propositions conformes feront l’objet d’une évaluation effectuée en fonction du prix global le plus bas, y compris les options et les caractéristiques souhaitables, après application des rajustements appropriés pour les caractéristiques souhaitables et les pourcentages de réduction obtenus du banc d’essais NSTL/SIPSS (à l’élément 01). Les propositions feront l’objet d’une évaluation effectuée en fonction de l’achat de 900 systèmes, y compris les options, et sur l’achat optionnel de 450 systèmes, y compris les options.

[Traduction]

Six proposants ont présenté des soumissions en réponse de la DR.

Le 16 mars 1999, le Ministère a procédé au dépouillement des soumissions. La soumission de Northern Micro, qui était certifiée conforme à toutes les exigences, a été jugée la moins-disante. Par conséquent, le 18 mars 1999, un marché a été adjugé à Northern Micro.

Selon le RIF, le 19 mars 1999, Revenu Canada a informé le Ministère que le moniteur ADI 5GT de 17 po proposé par Northern Micro n’était pas conforme, parce qu’il n’était pas équipé de haut-parleurs intégrés. Le même jour, le Ministère a demandé, par télécopieur, à Northern Micro de confirmer que le moniteur de 17 po proposé respectait l’exigence obligatoire selon laquelle le moniteur de 17 po devait être équipé de haut-parleurs intégrés. Le Ministère a ensuite communiqué, par téléphone, avec Northern Micro pour vérifier que la communication par télécopieur avait été reçue. Au cours de la conversation, Northern Micro a demandé une réunion avec le Ministère, qui a eu lieu plus tard le jour même.

À la réunion, Northern Micro a présenté au Ministère une lettre datée du 19 mars 1999, précisant ce qui suit :

En ce qui a trait au marché susmentionné, Northern Micro voudrait présenter une proposition de substitution de notre moniteur 17 po. Nous désirons substituer le moniteur ADI 5GT de 17 po par un moniteur Philips 107 MP « Brilliance Multi Media monitor » avec haut-parleurs intégrés qui respecte toutes les spécifications du contrat (spécifications jointes). Le prix unitaire restera tel qu’il est indiqué dans notre soumission. Veuillez accepter cette lettre à titre de demande de substitution de produit.

[Traduction]

Selon le RIF, le Ministère a indiqué ne pas pouvoir accepter cette solution de rechange parce que le premier moniteur proposé par Northern Micro dans sa soumission n’était pas conforme. Selon le RIF, Northern Micro a ensuite demandé au Ministère d’accepter le moniteur prévu à l’origine, avec l’engagement de Northern Micro de fournir, à ses frais, des haut-parleurs de bonne qualité pour chaque moniteur. Le Ministère a réitéré que cette solution de rechange n’était pas acceptable, étant donné que les haut-parleurs désormais offerts ne faisaient manifestement pas partie de la soumission de Northern Micro. Selon le RIF, à la demande de Northern Micro, le Ministère a accepté de renvoyer aux conseillers techniques du Ministère la question de conformité avec l’exigence obligatoire prévue dans la DR, en ajoutant que, vu que la solution de rechange proposée n’avait pas été offerte dans la soumission de Northern Micro, le Ministère ne modifierait pas sa décision.

À la suite de la réunion, Northern Micro a envoyé au Ministère, par télécopieur, deux lettres datées du 19 mars 1999, dont l’une était une copie de la lettre mentionnée ci-dessus et l’autre indiquait, entre autres choses, que le moniteur de 17 po proposé dans la soumission de Northern Micro « est assorti d’une paire de haut-parleurs Labtec LCS-1224 3D » [traduction].

Le 25 mars 1999, le Ministère a signalé à Northern Micro qu’il avait réexaminé sa soumission et que nulle part dans celle-ci n’était-il fait mention des haut-parleurs. Par conséquent, le Ministère a précisé à Northern Micro que, avec son accord, le marché serait résilié par consentement mutuel, à défaut de quoi il serait résilié pour raison d’inexécution.

Le 26 mars 1999, Northern Micro a informé le Ministère qu’elle n’était pas d’accord pour la résiliation du marché. Le 29 mars 1999, le Ministère a signalé à Northern Micro que le marché serait résilié. Le 30 mars 1999, le Ministère a signalé à Revenu Canada et à Northern Micro son intention de procéder à un nouvel appel d’offres parce que, à cette date, aucun autre proposant ne pouvait respecter les exigences obligatoires reliées à la livraison.

BIEN-FONDÉ DE LA PLAINTE

Position du Ministère

Le Ministère a soutenu que le Tribunal n’avait pas compétence pour juger d’une allégation de résiliation injustifiée d’un marché. Le Ministère a fait valoir que la démarche de Northern Micro découle de la résiliation censément injustifiée d’un marché ayant force exécutoire conclu entre les parties, qui est fondée sur l’exercice de droit et l’exécution d’obligations en droit contractuel. Par conséquent, le Ministère a soutenu que la question de savoir s’il a été justifié de résilier le marché pour raison d’inexécution n’est pas, à juste titre, l’objet d’un exercice d’examen de marché public, conformément aux dispositions du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le TCCE et de son règlement. Le Ministère a fait valoir que, compte tenu des particularités de cette plainte, la procédure de passation du marché public, en ce qui a trait au marché en question s’est terminée par l’adjudication d’un contrat ayant force exécutoire à Northern Micro le 18 mars 1999.

Sous réserve de ce qui précède et à titre de solution de rechange, le Ministère a soutenu que la question qui sous-tend la résiliation du marché pour raison d’inexécution consiste à savoir si la fourniture de haut-parleurs intégrés faisait effectivement partie de la soumission de Northern Micro.

Le Ministère a affirmé qu’il a correctement déterminé que le moniteur ADI 5GT proposé dans la soumission de Northern Micro n’était pas équipé de haut-parleurs intégrés et que la réponse de Northern Micro à l’appel d’offres identifiait les produits livrables visés dans sa soumission par la marque et le numéro de modèle, exception faite des haut-parleurs.

Le Ministère a soutenu que les haut-parleurs n’étaient pas clairement précisés dans la soumission de Northern Micro. Le Ministère fait valoir que ce fait a été corroboré par l’admission de Northern Micro, lors de la réunion du 19 mars 1999, du non respect accidentel de l’exigence obligatoire des haut-parleurs intégrés, par son offre ultérieure de remédier à ce problème et par le fait que le moniteur ADI 5GT n’était pas équipé de haut-parleurs intégrés.

Le Ministère a soutenu que, même s’il avait été établi, avant l’adjudication du contrat, que le moniteur ADI 5GT ne respectait pas l’exigence obligatoire de la DR, il n’aurait pu permettre à Northern Micro d’ajouter des haut-parleurs dans sa soumission dans le cadre d’un processus de « précision », étant donné que cette solution aurait constitué des nouveaux renseignements supplémentaires à la soumission de Northern Micro et, par conséquent, aurait constitué une réparation non permise de soumission.

En ce qui a trait à l’expression « haut-parleurs intégrés », le Ministère a fait valoir que l’interprétation acceptée du terme s’entend d’un moniteur équipé de haut-parleurs logés à l’intérieur du boîtier. Tous les contrôles du haut-parleur seraient accessibles par un menu à l’écran, et l’interrupteur et le câble d’alimentation seraient communs. Cette interprétation, selon le Ministère, est le meilleur exemple du sens ordinaire du mot « intégré », qui est d’incorporer en une unité plus grande ou former un tout.

Le Ministère a signalé qu’un autre sens, moins courant, toutefois, de l’expression « haut-parleur intégré » est une combinaison de moniteur et de haut-parleurs externes dont les composantes ont été conçues spécifiquement pour s’assembler, sans pièce supplémentaire ou modification aux boîtiers. Selon le Ministère, le moniteur ADI 5GT offert par Northern Micro ne répondait pas à cette description. Cependant, le Ministère a constaté, en outre, que plusieurs autres moniteurs ADI étaient assortis de haut-parleurs optionnels.

De toute façon, le Ministère a soutenu que le moniteur ADI 5GT offert par Northern Micro ne respecte ni l’une ni l’autre des interprétations susmentionnées. Nulle part dans la description du moniteur ADI 5GT, donnée sur le site Web du fabricant, n’était-il fait mention de haut-parleurs « intégrés » ou « optionnels ». Plutôt, la description du moniteur ADI 5GT indiquait clairement « haut-parleur : s.o. » [traduction]. Le Ministère a ajouté que Northern Micro a elle-même, dans sa réponse au « sondage sur les caractéristiques » pour la société National Software Testing Laboratories, la tierce partie indépendante retenue pour les essais de performance du système de micro-ordinateur offert par Northern Micro, indiqué que le moniteur ADI 5GT n’était pas équipé de haut-parleurs intégrés.

En ce qui concerne l’argument de Northern Micro selon lequel la livraison d’une boîte distincte de haut-parleurs et de pièces supplémentaires, comme des supports, servant à modifier le boîtier du moniteur pour l’installation des haut-parleurs est conforme à l’exigence obligatoire que le moniteur de 17 po soit assorti de haut-parleurs intégrés, le Ministère a fait valoir que, non seulement cet argument est-il indéfendable, mais que rien, dans la soumission de Northern Micro, ne donnait à croire que le moniteur serait livré avec haut-parleurs pour former un tout. Nulle part dans la soumission n’a-t-il été fait mention de haut-parleurs Labtec externes, ni de la nécessité d’effectuer des travaux d’intégration ou d’installation.

Le Ministère a demandé qu’on lui donne l’occasion de présenter d’autres arguments en ce qui a trait au remboursement des frais dans la présente affaire.

Position de Northern Micro

En ce qui a trait à la question de compétence, Northern Micro soutient que l’argumentation du Ministère à cet égard n’est pas fondée. Il est tout à fait clair que la plainte qu’elle a déposée porte presque entièrement sur la procédure d’évaluation des soumissions.

En ce qui concerne les arguments du Ministère selon lesquels la proposition de Northern Micro n’était pas conforme parce qu’elle ne prévoyait pas la fourniture de moniteurs avec « haut-parleurs intégrés », Northern Micro a soutenu que le « sondage sur les caractéristiques » dont le Ministère a fait mention n’était pas destiné à servir à l’appel d’offres en litige et que le moniteur ADI 5GT proposé en réponse au « sondage sur les caractéristiques » répond aux exigences obligatoires minimales de l’OCPN. Northern Micro ajoute que la DR comportait un certain nombre de modifications aux exigences obligatoires d’ordinateurs de bureau, selon ce qui est précisé dans l’OCPN, l’une d’entre elles portant sur un moniteur optionnel de 17 po avec haut-parleurs intégrés. De plus, Northern Micro a déclaré que nulle part dans la DR, n’était-il indiqué que les soumissionnaires devaient décrire les sous-composantes formant chacune des composantes du système informatique de bureau, l’intégration du moniteur de 17 po et des haut-parleurs, non plus que la marque ou le modèle des haut-parleurs. Northern Micro a fait valoir que la responsabilité de proposer un système respectant les exigences obligatoires énoncées dans la DR est celle du soumissionnaire.

De plus, Northern Micro a soutenu qu’elle avait l’intention, à titre d’intégrateur de systèmes, de fournir une paire de haut-parleurs Labtec LCS-1224 3D avec chaque moniteur optionnel ADI 5GT. Les haut-parleurs seraient reliés électroniquement à la carte de son de l’ordinateur et affixés aux ordinateurs.

Northern Micro a fait valoir qu’elle a offert un moniteur ADI 5GT en étant parfaitement au courant des caractéristiques du moniteur et du fait qu’il n’est pas équipé de haut-parleurs stéréo intégrés, et allègue qu’elle avait pleinement raison de proposer le moniteur comme conforme. Northern Micro a déclaré qu’elle n’était pas requise de préciser les modifications à apporter au moniteur, ni de l’intégrer à d’autre équipement, pour être conforme aux exigences obligatoires de la DR. De plus, Northern Micro a fait valoir qu’il ressort du RIF que le Ministère n’avait pas de définition claire de l’expression « haut-parleurs intégrés » lorsque la DR a été émise. Northern Micro a allégué, par conséquent, que chaque soumissionnaire avait le droit d’interpréter l’expression selon les normes de l’industrie. L’interprétation apparente du Ministère, c.-à-d. des haut-parleurs logés à l’intérieur du boîtier du moniteur ou des haut-parleurs mobiles conçus pour le boîtier du moniteur, est plus étroite que l’interprétation de Northern Micro, qui comprend également l’utilisation de haut-parleurs Labtec ou autres conçus pour différents moniteurs et qui ne sont pas dotés des haut-parleurs internes. Northern Micro soutient que cette dernière définition est conforme à l’expertise et à l’expérience de Northern Micro à titre d’intégrateur de systèmes.

En ce qui a trait à la déclaration qu’elle aurait faite lors de la réunion du 19 mars 1999 avec le Ministère, Northern Micro nie avoir admis qu’elle avait oublié par erreur l’exigence obligatoire des haut-parleurs intégrés. Elle a déclaré que son offre de substituer un autre moniteur était une tentative visant à régler rapidement le problème de façon avantageuse pour les deux parties.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal est tenu, lorsqu’il a décidé d’enquêter, de limiter son étude à l’objet de la plainte. En outre, à la fin de l’enquête, le Tribunal doit déterminer le bien-fondé de la plainte en fonction du respect des critères et des procédures établis par règlement pour le marché particulier. De plus, l’article 11 du Règlement prévoit, notamment, que le Tribunal doit déterminer si le marché public à été passé conformément, notamment, aux exigences de l’ALÉNA et de l’ACI.

Le Tribunal examine d’abord l’argument du Ministère selon lequel le Tribunal n’aurait pas compétence pour examiner la plainte parce que la procédure de passation du marché public en ce qui a trait au marché spécifique a pris fin à l’adjudication d’un marché ayant force exécutoire à Northern Micro le 18 mars 1999.

Le paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le TCCE prévoit, entre autres choses, que tout fournisseur éventuel peut déposer une plainte auprès du Tribunal au sujet de la « procédure de passation de marché public » relativement à un marché particulier et lui demander d’enquêter sur cette plainte. Fondamentalement, l’expression « procédure de passation du marché public » dans les dispositions pertinentes des accords commerciaux applicables, notamment l’alinéa 1017(1)a) de l’ALÉNA et l’alinéa 514(2)a) de l’ACI, s’entend du moment où une entité exprime un besoin jusqu’à l’adjudication du marché.

Le Tribunal est d’avis que l’évaluation des soumissions et l’adjudication de marchés sont manifestement des aspects de la procédure de passation du marché public. Que les irrégularités alléguées à cet égard soient mises à jour après l’adjudication du marché n’a aucune incidence sur la compétence du Tribunal à recevoir, à enquêter et à rendre une décision à l’égard de telles plaintes. Au contraire, il est assez fréquent que le Tribunal reçoive des plaintes seulement après l’adjudication d’un marché, généralement de la part d’une partie plaignante autre que l’adjudicataire, comme dans le cas qui nous occupe. Cependant, le Tribunal est d’avis que le seul fait que l’adjudicataire soit la partie plaignante ne diminue en rien sa compétence.

Dans la présente affaire, le Tribunal doit déterminer si le Ministère a agi conformément aux obligations énoncées dans les dispositions pertinentes des accords commerciaux applicables lorsqu’il a déterminé que la soumission de Northern Micro ne respectait pas, au moment de l’ouverture des soumissions, toutes les exigences obligatoires de la DR, notamment celle portant sur les haut-parleurs intégrés. Cela fait pleinement partie de la procédure de passation du marché public, où le Tribunal a compétence, comme cela serait le cas si un autre fournisseur possible avait déposé une plainte auprès du Tribunal au sujet de l’adjudication du marché à l’adjudicataire, alléguant que la soumission de l’adjudicataire ne respectait pas toutes les exigences obligatoires de la DR.

En ce qui a trait au bien-fondé de la présente plainte, le Tribunal signale que le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit, en partie, que « [l]es documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les exigences du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères ». L’alinéa 1015(4)a) de l’ALÉNA précise que « pour être considérée en vue de l’adjudication, une soumission devra être conforme, au moment de son ouverture, aux conditions essentielles spécifiées dans les avis ou dans la documentation relative à l’appel d’offres, et avoir été présenté à un fournisseur remplissant les conditions de participation ».

Il convient de noter que, dans l’invitation à soumissionner, l’élément 04 de l’annexe C de la DR indique clairement que les moniteurs de 17 po proposés doivent être équipés de haut-parleurs intégrés. Le paragraphe 1 de la DR énonce également que les soumissionnaires doivent indiquer le prix unitaire ferme de tous les produits livrables spécifiés pour que la proposition soit étudiée. Ce fait n’est pas en litige. L’objet du litige consiste à savoir si, au moment de l’ouverture des soumissions, la proposition de Northern Micro respectait l’exigence obligatoire relative aux haut-parleurs intégrés.

À cet égard, les parties sont d’avis que Northern Micro a offert, dans sa réponse à l’appel d’offres, des moniteurs ADI 5GT et que ces moniteurs ne sont pas équipés de haut-parleurs intégrés. Le Ministère a allégué que rien dans la soumission de Northern Micro n’indiquait que des haut-parleurs seraient fournis et seraient intégrés aux moniteurs proposés. Tout en étant d’accord sur cette assertion, Northern Micro a fait valoir que la DR ne précisait pas qu’il était nécessaire de signaler quelles sous-composantes étaient incluses dans les soumissions des proposants et que le fait qu’aucune composante particulière ne soit mentionnée dans sa soumission en ce qui a trait aux haut-parleurs ne signifie pas que ces composantes n’étaient pas offertes. Northern Micro a plutôt soutenu qu’en l’absence de toute exigence obligatoire particulière à cette fin dans la DR, sa déclaration générale de conformité devrait être suffisante pour prouver qu’elle prévoyait offrir les haut-parleurs requis.

Après avoir examiné avec soin tous les éléments de preuve, le Tribunal conclut, conformément aux dispositions susmentionnées des accords commerciaux applicables, que la décision du Ministère n’était pas contraire à la procédure et aux autres exigences spécifiées lorsqu’il a conclu que la soumission de Northern Micro ne comprenait pas de haut-parleurs, intégrés ou non, au moment de l’ouverture des soumissions. La documentation du fabricant au sujet des moniteurs proposés n’indique pas qu’ils sont équipés de haut-parleurs intégrés. En fait, dans la colonne de la description des haut-parleurs pour le moniteur proposé, le fabricant a indiqué « N/A » (« s.o. »). Lorsque le Ministère a demandé à Northern Micro, le 19 mars 1999, de confirmer que sa soumission comprenait des haut-parleurs intégrés, Northern Micro a plutôt demandé une réunion. À cette réunion, Northern Micro a offert de remplacer, sans frais supplémentaires, les moniteurs ADI 5GT par des moniteurs de marque et de modèle différents. À titre de solution de rechange, Northern Micro a proposé de fournir, à ses frais, des haut-parleurs de bonne qualité avec chaque moniteur. Le Tribunal comprend mal l’approche de Northern Micro si, comme elle l’indiquait dans sa lettre du 19 mars 1999, sa soumission comprenait des haut-parleurs de marque Labtec. Le Tribunal note également que, même si Northern Micro prétend que la DR ne renfermait pas des exigences particulières l’obligeant à préciser dans sa soumission les composantes du système informatique de bureau, elle l’a quand même fait pour tous les produits livrables sauf les haut-parleurs. Le Tribunal est d’avis que, en procédant de la façon dont elle l’a fait, Northern Micro devait établir, à la satisfaction du Ministère, que sa soumission comprenait effectivement des haut-parleurs. Il était raisonnable de conclure qu’elle ne l’a pas fait.

Tout compte fait, par conséquent, le Tribunal conclut que le Ministère avait raison de décider, après révision, que la soumission de Northern Micro n’était pas conforme à toutes les exigences obligatoires de la DR du fait qu’elle ne comprenait pas de haut-parleurs intégrés. En fait, s’il ne l’avait pas fait, le Ministère se serait placé dans une position où ses décisions auraient pu être jugées contraires à la procédure et aux exigences spécifiées dans les accords applicables et dans la documentation relative à l’appel d’offres. Le Ministère aurait, par conséquent, pu s’exposer aux poursuites d’autres fournisseurs éventuels.

DÉCISION DU TRIBUNAL

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal détermine que le marché public a été passé conformément aux dispositions applicables de l’ACI et de l’ALÉNA et que, par conséquent, la plainte n’est pas fondée.

Le Ministère a demandé, dans le RIF, qu’on lui donne l’occasion de présenter d’autres arguments sur les frais à adjuger dans la présente affaire. Étant donné qu’il n’a pu établir qu’il y a eu mauvaise foi de la part de Northern Micro, le Tribunal n’accordera pas au Ministère le remboursement de ses coûts dans la présente affaire.


1. L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

2. Offre à l’usage de plusieurs utilisateurs identifiés partout au Canada de la part de fournisseurs éventuels, qui permet au gouvernement fédéral d’acheter directement auprès de certaines sociétés des biens ou des services disponibles ou non dans le commerce à des prix préétablis et à des conditions fixes, lorsqu’ils seront requis, le cas échéant. Un contrat est conclu au moment où une commande est passée dans le cadre de cette offre à commandes.

3. Selon le rapport de l’institution fédérale, l’OCPN pour des micro-ordinateurs établit la procédure permettant à tous les fournisseurs éventuels qui respectent le critère de sélection et qui ont reçu l’OCPN de répondre à une demande de ristourne.

4. Signé à Ottawa (Ontario) les 11 et 17 décembre 1992, à Mexico (D.F.) les 14 et 17 décembre 1992 et à Washington (D.C.) les 8 et 17 décembre 1992 (en vigueur au Canada le 1er janvier 1994).

5. Signé à Ottawa (Ontario) le 18 juillet 1994.

6. Procédure qui permet à tous les fournisseurs éventuels ayant des systèmes entrant dans la catégorie requise de l’OCPN de présenter des soumissions finales selon les quantités et les conditions modifiées d’un client particulier, soit Revenu Canada.

7. DORS/93-602, le 15 décembre 1993, Gazette du Canada Partie II, vol. 127, no 26 à la p. 4547, modifié.

8. DORS/91-499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, no 18 à la p. 2912, modifiées.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 27 août 1999